lundi 27 avril 2015

La Chapelle de Condat en Danger?



COMMUNIQUE SPECIAL OPPAL







La Chapelle de Condat en Danger?



        En raison de la grande inquiétude suscitée par la vente de la propriété Fournial, à l'entrée de la Palus de Condat et attenante à la Chapelle Royale Notre Dame de Condat, nous avons décidé avec Monsieur Jean-Marie Fautrier, président de l'Association de la Chapelle Royale Notre Dame de Condat, Monsieur Christophe-Luc Robin, président de la Revue Historique et Archéologique de Libourne, ainsi que d'autres présidents d'associations concernant de près ou de loin le patrimoine libournais, de rester en alerte maximale concernant le devenir architectural de ce domaine. 

     Les rumeurs de sa vente à un promoteur s'avérant fondées, j'ai demandé conseil à Monsieur Philippe Buisson, Maire de Libourne, qui m'a répondu en ces termes:


La Ville a été effectivement contactée par un promoteur ayant un projet de lotissement sur ce terrain. 
Toutefois, étant en cours d'élaboration de notre Plan Local d'Urbanisme, l'évolution et la constructibilité de certains terrains sont "gelées", et celui-ci en fait partie. En effet, l'étude en cours n'est pas assez aboutie pour que l'on puisse statuer sur la destination et l'occupation futures de ces terrains à enjeux.
Par ailleurs, depuis l'approbation de l'Aire de Valorisation de l'Architecture et du Patrimoine le 30 septembre dernier ce terrain est soumis au règlement du secteur "Faubourgs anciens". A ce titre, il est donc protégé par un règlement spécifique destiné à contrôler les opérations qui s'opèrent sur le patrimoine et le bâti ancien.


      Ces propos (rassurants?) doivent être nécessairement rattachés à la grande préciosité du lieu en matière d'histoire locale et régionale ainsi qu'en matière de découvertes patrimoniales (la propriété se trouve à l'endroit même où se situait le grand château des ducs d'Aquitaine et pourrait faire l'objet de fouilles archéologiques). 

       Mes derniers travaux de recherches concernant l'histoire de Notre Dame de Condat, tendent à la situer sur un ancien temple druidique dédié à la Déesse Divona, déesse des eaux et de la source de Condat (qui se trouve sur la propriété de Mr et Mme Ponty, l'ancien presbytère Saint-Yves). C'est Saint Amadour qui aurait évangélisé le lieu dès le premier siècle après J.-C. comme l'atteste le fémur du grand reliquaire de la Chapelle et les enquêtes effectuées auprès du Recteur du sanctuaire de Rocamadour qui souhaite procéder à l'authentification des reliques du Saint l'année prochaine. 

         Ces éléments nouveaux nous obligent à reconsidérer la palus de Condat dans son ensemble et particulièrement la zone entourant la chapelle (dont la propriété Fournial)  afin de mettre en valeur ce lieu extraordinaire et d'y effectuer de plus amples travaux de recherches. 

        Il ne faut pas oublier qu'il s'inscrit dans le programme municipal de création d'une zone de promenade de Condat jusqu'aux Dagueys et participe de plein fouet à l'ambitieux et beau projet de redynamisation touristique de notre jolie bastide, notamment en matière de tourisme fluvial avec l'accueil des nombreux anglo-saxons qui débarquent régulièrement à Libourne, ancienne bastide anglaise.
          Notre histoire, c'est aussi la leur. 
        Les y faire participer, c'est renouer avec notre passé et nos valeurs culturelles, c'est ouvrir nos capacités d'accueil touristiques et développer des relations sociales et commerciales inexistantes sur le plan patrimonial.

     Alors sauvons Condat et nous sauverons Libourne de son long sommeil historique.


Camille Desveaux

vendredi 17 avril 2015

L'église Saint-Jean fait ses Pâques




   


 L'église Saint-Jean fait ses Pâques !


En ce mois d'avril 2015, vous allez pouvoir contempler les magnifiques cloches de l'église Saint Jean-Baptiste de Libourne qui vont être déposées dans l'église pour la restauration du système campanaire. 
C'est l'occasion pour vous de découvrir l'histoire de ces oeuvres centenaires et c'est l'occasion pour moi de vous raconter l'arrivée des chevaliers de l'Ordre de Saint Jean-Baptiste (aujourd'hui Ordre de Malte) dans notre région, à Lalande de Pomerol, Pomerol et Libourne...






Les Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem à Lalande de Pomerol


A partir de l’An mil, La reconquête des Lieux Saints, en Europe et en Orient, donna lieu à la création de nombreuses villes et villages qui s’égrenèrent le long des anciennes voies romaines devenues voies de pèlerinage. La Reconquista Espagnole, la Première Croisade, la fondation des ordres hospitaliers et templiers… réveillèrent la foi des chrétiens et offrirent un nouvel élan à la production du vin, symbole christique par excellence.

C’est à cette époque que naquit le village de Lalande de Pomerol, près de Libourne, et sa commanderie hospitalière sur la voie de pèlerinage reliant Tours à Belin-Beliet.

- L’arrivée des Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem dans le midi de la France

Vers la fin du XIème siècle, un religieux du nom de frère Gérard, originaire, selon les sources, de la région d’Amalfi en Italie, avait rejoint la Ville Sainte pour aider les chrétiens, à reconstruire l’église du Saint Sépulcre rasée par un Calife fatimide au début de l’An mil. Face à la détresse des pèlerins de la première croisade et des marchands arrivant à Jérusalem éreintés et souvent malmenés, frère Gérard décida de fonder un hôpital sous la protection de Saint Jean-Baptiste afin de leur venir en aide et de les soulager. Plusieurs frères, gagnés par sa foi, décidèrent de le suivre et devinrent les premiers Hospitaliers de l’Ordre de Saint-Jean de Jérusalem qu’il fonda autour de l’an 1100 (l’Ordre fut approuvé le 15 février 1113 par le pape Pascal II). Rentré en France, frère Gérard prit conscience de la nécessité de l’Ordre de se ramifier en autant d’hôpitaux et de commanderies afin d’accueillir les pèlerins toujours plus nombreux et de les accompagner lors de leurs périlleux voyages vers les Lieux Saints. On distinguait déjà les frères qui demeuraient à résidence pour prier, travailler, administrer les domaines et accueillir les voyageurs, des frères chevaliers qui participaient aux croisades. Vers 1105, il créa les Grands Prieurés de Saint-Gilles et Toulouse, maisons mères de toutes les ramifications de Gascogne et du midi de la France. Rapidement l’Ordre se trouva à la tête d’un immense territoire et acquit des richesses considérables grâce aux largesses de nombreux donateurs désireux de participer au salut de leur âme en échange de messes à leur intention ou à l’intention de leur famille.

Tous les frères étaient des religieux, même les frères chevaliers, liés par les trois vœux monastiques de Pauvreté, de Chasteté et d’Obéissance, ils adoptèrent comme insigne la croix amalfitaine à huit pointes qui en plus de les lier à leurs origines symbolisait les béatitudes de la foi. Leurs manteaux étaient noirs, l’étendard rouge, et la croix toujours blanche.


- La commanderie de Lalande de Pomerol

Les noms de Poumeyrol et de Lalande de Poumeyrol apparaissent dans un cartulaire attestant la donation de terres aux Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem au XIIème siècle

Selon les recherches étymologiques de l’historien régional J.A. Garde, la plus ancienne forme latine rencontrée dans un texte de 1327 est Pomeriolis dont la racine poma veut dire fruit à pépins et plus spécialement raisin, comme l’atteste l’empereur Justinien dans son recueil méthodique des Pandectes. D’autres villes françaises à vocation viticole portent ce nom à l’instar de la commune de Pomérols dans l’Héraut. Cette découverte étymologique réfute l’idée première des chercheurs qui pensaient que poma voulait dire pomme et corrobore la thèse d’un vignoble condatais et pomerolais à l’époque d’Ausone.

Dans ce cartulaire du XIIème siècle, appartenant au fonds des Archives Départementales de la Haute-Garonne, on découvre l’établissement des chevaliers de l’Ordre des Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem dans la Châtellenie de Puynormand. On y apprend que les chevaliers Aychard et Bernard de Seilles donnèrent leurs terres situées entre Brettes et le ruisseau de Comparras, aux chanoines de Saint-Etienne du Peyrat puis aux Hospitaliers, Adhémar et Ayquelin de Gesta.

Cette donation, dit le cartulaire, eut lieu du temps du Prieur Gérard (fondateur de l’Ordre des Hospitaliers en 1113), ce qui permet de dater l’arrivée des chevaliers vers la fin du XIème siècle et le début du XIIème siècle sur le territoire de Lalande de Pomerol. Le vicomte de Castillon approuva et confirma cette donation.

Adhémar administra ces domaines pendant quarante ans et en donna une partie à des cultivateurs, moyennant certaines redevances. Adhémar était l’administrateur du grand Prieuré de Bordeaux qui se situait près de l’ancien Pont-Neuf, près de la rue de l’Ombrière détruite lors de la percée du Cours Alsace-Lorraine. Une étude effectuée par l’historien Eric Murat, mentionne Adhémar comme premier commandeur de l’Hôpital de Bordeaux de 1100 à 1140. C’est sous son impulsion, semble-t-il, que l’église principale de Libourne prit le nom de Saint Jean-Baptiste, comme de nombreuses églises dans la région (Lalande, Pomerol, Cadarsac, Libourne, etc.). Les Hospitaliers de Lalande de Pomerol possédaient de nombreux biens à Libourne dans lesquels ils se réfugiaient à chaque attaque de leur commanderie lors des périodes de troubles. Ils étaient aussi influents que respéctés.

A Lalande de Poumeyrol, nombreux furent les seigneurs locaux qui, « au nom des Saints Evangiles et pour le salut de leur âme », distribuèrent des terres et des largesses financières aux Hospitaliers. On compte Raymond et Pierre d'Abzac, Pons de Montaigne, W. de Segur, le seigneur Ayz de Puynormand, Pierre de Saint-Seurin, W. Arnaud de Seilles et dame Orgolose, sa femme, W. de Montrebet, damoiseau, fils d'Arnaud Faidit, chevalier de Fronzac…

La commanderie, nouvellement créée grâce à l’implantation des Hospitaliers, appartenait à la Vicomté de Castillon, ancien archiprêtré d’Entre-Dordogne. Selon l’historien J.A. Garde, « l’Entre-Dordogne fut d’abord une subdivision civile remontant à l’époque gallo-romaine, puis une subdivision religieuse à l’avènement du Christianisme ». Les archiprêtrés existaient vraisemblablement dès le IVème Siècle puisque la ville de Burdigala était déjà dotée d’un archevêque. En fait, cette subdivision religieuse correspondait exactement aux oppida ou castra de la Gaule. Par la suite, l’archiprêtré d’Entre-Dordogne, devint la Vicomté de Castillon, conservant exactement les mêmes limites. Le Vicomte de Castillon exerçait au XIIème siècle son autorité sur l’ensemble du territoire de l’Entre-Dordogne, comme l’attestent les cartulaires de la fondation de l’Hôpital de Lalande de Pomerol et de la fondation de l’abbaye de Faise à Lussac.

La vicomté de Castillon comprenait donc deux subdivisions :
- l’immense châtellenie de Puynormand, au nord du ruisseau de la Barbanne
- la châtellenie de Condat et Barbanne, au sud de la Barbanne.

- Les églises hospitalières de Lalande de Pomerol et de Pomerol

La paroisse de Lalande de Pomerol fut érigée en commanderie hospitalière en même temps que celle de Pomerol. L’église et l’hôpital étaient les deux points forts des commanderies et servirent d’ossature aux communes naissantes. Les églises de Lalande de Pomerol et de Pomerol, de type roman, possédaient la même architecture que toutes les églises hospitalières dont le corps principal était formé par un quadrilatère.

« Les seuls ordres qui aient, dans nos pays, bâti suivant une formule originale leurs églises conventuelles sont les Hospitaliers et les Templiers. Ces églises là se reconnaissent à première vue : ce sont des édifices rectangulaires à chevet plat percé de trois fenêtres, à contreforts de faible saillie. La nef unique est tantôt couverte d’une charpente, tantôt d’un berceau sur doubleaux, qui, eux-mêmes, retombent sur des colonnes engagées ; l’appareil est soigné ; à l’extérieur, les murs de flanc portent à mi hauteur une série de corbeaux qui recevaient la poutre faîtière du toit en appentis de logis. »

L’église de Lalande de Pomerol possède les mêmes caractéristiques. Nous pouvons la décrire aujourd’hui telle qu’elle est encore, car c’est l’unique vestige des églises hospitalières dans la région.
Elle est, en ce sens, un monument unique en Gironde qui requiert une immense vigilance tant sur le plan architectural que sur les plans historiques et patrimoniaux. 
A l’intérieur, les chapiteaux, communs aux églises hospitalières sont portés par des colonnes engagées, mais exceptionnellement le mur du chevet possède cinq fenêtres : deux grandes en haut en et trois plus étroites en dessous.




« La façade, nous dit l’historien J.A. Garde, est disposée en trois étages. La porte est formée de quatre arcades en retrait et la voussure interne polylobée présente d’élégants fleurons ; elle est flanquée de deux autres portes borgnes. Au deuxième étage on trouve une fenêtre agrandie au XIXème siècle et deux fenêtres feintes posées sur un tablier en saillie que portent des corbeaux sculptés de masques humains et de figures d’animaux. Toutes les archivoltes sont à dents de scie. »

Ces églises faisaient partie intégrante de la commanderie à laquelle elles appartenaient. A Pomerol, elle s’élevait sur le point culminant de la paroisse à quelques pas de la route reliant Saint-Emilion à Guîtres. L’hôpital, quant à lui, se situait à deux kilomètres en contrebas près de la paroisse de Saint-Emilion au croisement de deux grands axes de communication : la route Guîtres-Saint-Emilion et l’ancienne grande route Libourne-Périgueux.  Cette dernière, jusqu’à la construction de la route que l’on connaît aujourd’hui en 1749, sortait de la toute nouvelle bastide de Libourne par la porte de Périgueux (ou porte de la Terre) aujourd’hui entrée de la rue Gambetta, empruntait l’ancienne rue des Moulins ou cours de la Marne, passait à Catusseau et se dirigeait sur Montagne par la croix de Montagne.

De nombreuses croix hospitalières balisaient le chemin et servaient de repères aux pèlerins.
A Lalande de Pomerol, les limites de la paroisse étaient, elles aussi, délimitées par des croix hospitalières.  L’hôpital s’érigeait sur la route reliant Guîtres à Saint-Emilion, à plusieurs kilomètres en amont de l’hôpital de Pomerol.

Cette route entre Guîtres et Saint-Emilion est encore aujourd’hui nommée route de Saint-Jacques de Compostelle. Elle était autrefois une voie parallèle de la « Via Turonensis », reliant Paris et Tours à Saint-Jacques de Compostelle. Les hôpitaux de Lalande de Pomerol et de Pomerol mais aussi celui de Libourne (l’Hôpital Saint-James qui se situait en lieu et place de l’actuel Temple protestant place de la Croix Rouge), étaient des haltes privilégiées pour les pèlerins ou jacquets.





Camille Desveaux
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