Secrets d’Eté
Libourne au fil du temps…
A l'heure où l'été s'illumine, Libourne se pare de reflets nouveaux et chatoyants.
Le soleil joue avec son ombre sur les murs des maisons,
s'étalant hardiment sur les toits enflammés.
La ville, lentement s'éveille à la vie, sans bruit, sans heurt, sans crainte.
C'est le temps du voyage, l'invitation au rêve...
Voici quelques uns de mes secrets...
Le soleil joue avec son ombre sur les murs des maisons,
s'étalant hardiment sur les toits enflammés.
La ville, lentement s'éveille à la vie, sans bruit, sans heurt, sans crainte.
C'est le temps du voyage, l'invitation au rêve...
Voici quelques uns de mes secrets...
Lumière sur les vitraux de Libourne
De tous temps le
culte du soleil, source de vie et de fécondité, a été célébré par les hommes. Chaque
cosmogonie (naissance du monde et des hommes) débute par l’apparition du Soleil.
Considéré au départ comme une divinité parmi d’autres, même s’il se situe
toujours au somment de la hiérarchie, le soleil (et la lumière qu’il engendre)
va, petit à petit, sous l'influence de la philosophie grecque et des mystères
orientaux, évoluer vers une divinité à part entière, un monothéisme solaire. Au
XIVème siècle avant Jésus-Christ, Amenhotep IV fera d’Aton, le Dieu unique
d’Egypte et prendra le nom d’Akhénaton.
Pour les trois grandes religions
monothéistes, Dieu créa la lumière par sa Parole : « Que la lumière
soit ! » (Genèse 1). Et la lumière fut séparée des ténèbres pour
créer le jour.
Au moyen Age, ère
éminemment chrétienne en Occident, les maîtres verriers étaient appelés les
« passeurs de lumière ». Tels de véritables bijoutiers du verre, des
apôtres de la lumière divine et naturelle, ils alliaient la symbolique de la lumière
à sa réalité propre. Mille ans plus tôt, le Christ, rappelant sa nature de Fils
de Dieu, avait déclaré « Je suis la lumière du monde. Celui qui me suit
aura la lumière de la Vie et ne marchera plus dans l'obscurité » (Jean 8,
12).
Plus tard les philosophes
eux-mêmes utilisèrent cette symbolique. Le mouvement intellectuel communément
appelé siècle des Lumières au XVIIIème siècle fit de la lumière le symbole de
la connaissance, seule sortie possible de l’obscurantisme et les vitraux
artistiques firent leur apparition dans les monuments plublics ou chez de
riches particuliers. La lumière devient symbole de richesse (spirituelle et
temporelle).
A Libourne, les
plus beaux vitraux restent l’apanage des églises, couleurs et luminosité s’y
fondent en un résultat unique, transcendantal et parfois historique, mais les
grands monuments de la ville ne sont pas en reste ni les belles maisons bourgeoises
du XIXème siècle qui conservent parfois encore des chefs d’oeuvre incomparables.
Les Vitraux de L’église Saint-Jean
Le grand
vitrail du chœur, fondé en 1839 sous l’impulsion de l’abbé Charriez lors de la
restauration de l’église Saint-Jean, illustre toute la vie de Saint Jean-Baptiste.
Ces vitraux, composés de trois baies monumentales, sont l’œuvre du maître
verrier de Nozan qui venait de réaliser les vitraux de l’église Saint Germain
l’Auxerrois à Paris. Cette fresque exceptionnelle, tant par sa taille que par
sa beauté et sa couleur, est à rapprocher de l’histoire des Hospitaliers de
Saint-Jean de Jérusalem, qui participèrent à la diffusion du culte de
Saint-Jean Baptiste au XIIème siècle. Siècle où le premier nom de Libourne, Condatis
(le confluent) se transforma en Fozera par l’agrandissement de l’église
Saint-Jean de Fozera qui devint l’église paroissiale. On pense qu’elle était
appelée ainsi à cause de la végétation qui l’entourait composée d’un grand
nombre de fougères (fozera).
Les vitraux racontent l’histoire de Saint Jean-Baptiste
depuis sa naissance (première baie) jusqu’à sa décollation le jour de la grande
fête donnée en l’honneur du roi Hérode.
Ce jour là, la reine Hérodiade, jalouse du pouvoir de cet homme, ordonna
à sa fille, qui avait ébloui l’assemblée en dansant, de demander la tête de Jean
le Baptiste comme cadeau. En effet, le roi, émerveillé par la beauté de Salomé, lui avait offert en cadeau de remerciement tout ce qu’elle voudrait, jusqu’à la
moitié de son royaume. Lorsqu’elle demanda la tête de celui qui avait baptisé Jésus
dans le Jourdain et qui faisait de nombreux miracles autour de lui, le roi fut
très peiné mais il tint sa promesse (seconde baie).
Au cours du banquet (troisième vitrail), la tête du
Baptiste fut apportée au roi sur un plateau. Ainsi fut mis à mort celui qui
annonçait le Messie et dénonçait le caractère incestueux de la liaison entre
Hérode et Hérodiade, sa belle-sœur. Ses disciples emmenèrent son corps pour
l’enterrer.
Les Vitraux de l’église de l’Epinette
Dans un autre
registre, les vitraux de l’église de l’Epinette sont au nombre de huit et
encadrent quatre par quatre l’Ecce Homo central. Leur facture est très raffinée
aux couleurs vives et attirantes. Ces vitraux racontent l’histoire de l’arrivée
de la Sainte Epine à Libourne sous l’impulsion de Charlemagne en l’an 811. Si la
vérité historique s’estompe parfois derrière la beauté de l’oeuvre, elle n’en
reste pas moins un témoignage unique et visible du rôle de la sainte relique
dans l’histoire de la ville de Libourne.
Les vitraux sont signés M.Feur.
Marcel Feur, né le 9 janvier 1872 et mort le 28 septembre 1934, est un maître-verrier
français connu pour ses vitraux d'art. Fils d'Henri Feur dont il reprend en 1908 la
maison bordelaise fondée en 1850, il est notamment à l'origine de la
réalisation des vitraux de l’église Sainte-Marie Madeleine de Rennes le Château lors de sa rénovation par l'abbé Saunière à partir de 1872
et de ceux du transept et du chœur de l'église Saint-Martin à Cognac.
Les huit baies:
1- Charlemagne offre la Sainte Epine aux notables de
Condatis. L’église Saint Thomas et la confrérie Saint Clair accueillent la
Sainte Epine
2- Création de l’Eglise de l’Epinette (légende de l’arbre
illuminé). Translation de la Sainte Epine, Aliénor et la Sainte Epine.
3- Libourne anglaise (Richard Cœur de Lion ou le
Prince Noir), Jeanne de Kent en procession.
4- Du Guesclin vénère la Sainte Epine (1367). L’Hôtel de
ville en feu 1427. Louis XI vénère la Sainte Epine.
5- La Sainte Epine arrête la garnison déchaînée.
6- Les guerres de Religion. Le Cardinal de Sourdis.
7- Procession du Cardinal de Sourdis pour la translation
de la Sainte Epine à Saint-Jean Baptiste devant l’Hôtel de Ville.
8- Mgr d’Aviau et le nouveau reliquaire de la Sainte
Epine
Les Vitraux et vitreries de l’Hôtel de Ville
Un vitrail
exceptionnel reflète à lui seul toute l’histoire du monument, celui du Musée
des Beaux Arts. Signé Marcel Feur (encore une fois), il offre un style très
contemporain dans lequel les motifs géométriques encadrent les petits ensembles
picturaux. Le plus grand est celui du centre. Il représente Marianne habillée
en déesse Athéna reconnaissable à Niké (la victoire) qu’elle tient
triomphalement dans sa main droite avec la palme du mérite.
Le 2
février 1427, un manuscrit relaté par Jean-Baptiste Decazes au XVIIIème siècle,
indique que trois secousses de tremblement de terre ébranlèrent la ville et que
« les murs de l’Hôtel de Ville, déjà élevés en partie, pour recevoir la
charpente, furent tellement dégradés qu’il fallut en rebâtir la moitié »
(cf le vitrail n°4 de l’église de l’Epinette).
Ce monument perdura sans modifications jusqu’au XIXème
siècle.
Il n’était constitué alors que du corps principal,
rectangulaire qui s’étirait le long de la rue Jules Ferry. Il comportait une
toiture à forte pente dite « à la guise de France » avec pignon en
façade donnant sur la place. Le bâtiment était flanqué de deux tours, la tour
de l’Horloge située sur les couverts avec une chapelle aménagée à l’étage qui
jouxtait la salle de réunion de la Jurade, et la tour des Archives, toujours
située en prolongement du corps principal sur la rue Jules Ferry. Une tourelle
d’escalier située dans la cour, à l’emplacement de l’accueil permettait l’accès
à l’étage.
En 1907, le bâtiment primitif fut profondément remanié
tout en gardant l’esprit originel : vitraux et vitreries, boiseries et
bas-reliefs, complétèrent le riche ensemble architectural souhaité par
l’architecte Rapine.
Les vitraux de la Chapelle de Condat
La chapelle
du château des rois d’Angleterre, détruit à la fin de la Guerre de cent-Ans,
dans la presqu’île de Condat, devint rapidement, sous l’impulsion d’Aliénor
d’Aquitaine, un grand sanctuaire marial (dédié à la Vierge Marie). Sur les
chemins de Saint-Jacques de Compostelle, les pèlerins y venaient par milliers,
comme les nombreux marins de la Dordogne prêts à reprendre les voiles. Copie de
la chapelle basse de la Sainte Chapelle à Paris, tous ses vitraux racontent l’histoire
de la Vierge.
1- la présentation de la Vierge au Temple par ses parents
Anne et Joachim
2- l’Annonciation
3- la Visitation
4 (vitrail du choeur) : la Nativité
5 (vitrail du Chœur) : l’Adoration des Mages
6 : La Vierge en Majesté, récemment remis en lumière
par l’abaissement de la toiture de la sacristie.
7- (vitrail du Chœur) : présentation de Jésus au
Temple, avec le vieillard Siméon qui reconnaît le Sauveur dans les bras de
Marie.
8- (vitrail du chœur) : la Fuite en Egypte
9- la Sainte Famille
10- la mort du Christ
11- l’Assomption de la Vierge
Les vitraux sont signés Lusson et Lefèvre : en
1872, Antoine Lusson possèdait un atelier fort réputé à Paris et dans toute la
France. La célébrité de cet artiste originaire du Mans lui vient d’avoir
remporté le concours de restauration des vitraux de la Sainte-Chapelle en 1849
et d’avoir participé à de nombreux chantiers de restauration comme celui de
Notre-Dame de Paris. Chef de file du vitrail néo-gothique, il est un maillon
essentiel de la renaissance du vitrail au XIXe siècle. Son travail à la
Chapelle de Condat montre à tous ses visiteurs, la magnificence dont elle fut
l’objet au XIXème siècle.
Les vitraux de la Chapelle du Carmel
C’est en
1838 que l’abbé Charriez, qui avait participé à la restauration de l’église
Saint-Jean et à l’ouverture des baies destinées à recevoir les vitraux de
Saint-Jean Baptiste, décida de fonder un monastère du Carmel à Libourne.
Dès 1842, les libournais furent autorisés à assister aux
offices des Carmélites dissimulées derrière une haute grille selon leur vœu de
vivre cloîtrées.
La chapelle, seule édifice conservé après la fermeture du
Carmel et sa destruction, est un édifice à nef unique, décorée d’un faux
plafond et se terminant au nord-est par une abside. Elle est devenue l’annexe
contemporaine du Musée des Beaux Arts de Libourne.
Deux magnifiques rosaces ont survécu aux travaux de
démolition, celle de la façade aux motifs géométriques et entrelacs de feuilles
plutôt modernes à l’instar de la croix centrale aussi discrète que stylisée. L’entrée
de la chapelle étant située en face de la ville et de son magnifique Hôtel,
dans le prolongement de la rue Gambetta, veut certainement que le vitrail
d’entrée garde une certaine sobriété malgré la magnifique statue de la Vierge
du Mont Carmel qui le surplombe.
Les vitraux des grandes maisons bourgeoises
A Libourne, le XIXème siècle fut celui des
grands remaniements de la ville. Après la Révolution, les remparts furent
démolis à cause de la pression démographique. Les casernes furent construites,
les quais aménagés, les eaux canalisées, la verrerie et la faïencerie créées…
En 1848, l’éclairage public fit son
apparition à Libourne. Les grandes mesures d’hygiène publique prônées par les
municipalités successives permirent dans le même temps de créer un abattoir,
des Haras et un champ de foire. Enfin le pont de pierre construit en 1820 fut
classé parmi les 11 plus beaux de France.
La ville s’agrandit et la population passe de
8300 habitants en 1801 à plus de 20 000 habitants en 1911.
C’est dans ce conteste florissant que les
riches libournais n’hésitèrent pas à faire entrer à leur tour l’art et la
lumière dans leur demeures :
Vitrail du musée Robin à Libourne |
Petits vitraux du cimetière de la Paillette
Le cimetière de la Paillette reste un bel exemple de
restauration du XIXème siècle et est devenu un cimetière patrimonial par
excellence au même titre que le Père Lachaise à Paris ou la Chartreuse à
Bordeaux. De magnifiques monuments de pierre y sont dénombrés et parmi eux vingt-deux
chapelles funéraires dont certaines possèdent de jolis vitraux. Ici, la
symbolique ornementale est fort riche et nous plonge dans les dédales de
l’histoire et du temps.