Libourne ou l'étrange cimetière de
LA PAILLETTE
Si la
beauté de la mort peut nous paraître étrange voire étrangère à nous,
occidentaux du IIIème millénaire façonnés par le confort de notre vie moderne,
alors oui le cimetière de La Paillette est un lieu étrange où la mort est célébrée,
sculptée, gravée, encensée comme le plus grand des voyages : l’ultime et
mystérieux passage vers la vie éternelle.
L’éternité… la vie en plénitude des
hommes libérés du carcan de leur humanité, les retrouvailles célestes des êtres
douloureusement séparés…
De tout temps et peut-être plus encore
autrefois qu’aujourd’hui, la mort faisait partie de la vie comme la vie faisait
partie de la mort. C’était ainsi. Déjà les hommes de la Préhistoire enterraient
leurs défunts avec des objets du quotidien en vue de leur utilisation dans
l’au-delà…
Des vivants de la terre aux vivants
de l’Eden, le cimetière de La Paillette nous entraîne dans les dédales de
l’histoire de France au XIXème siècle et l’avènement d’un nouveau courant de
pensée : le Romantisme, entre ciel et terre…
Quand
l’art côtoie la mémoire
Lorsque
l’on pousse le large portail d’entrée du cimetière de La Paillette, la surprise
est immense : chaque stèle, chaque tombe, chaque mausolée semble avoir été
conçu de manière unique et singulière, loin de l’impression architecturale
parfois monotone des cimetières contemporains.
Ici un buste sculpté monumental, là
un bas-relief en bronze, plus loin la silhouette gracile d’une jeune femme en
pleurs ou encore la délicate représentation d’une belle endormie.
Partout la beauté l’emporte.
Et plus encore cette sensation de
vie émanant de l’utilisation de la pierre comme matériau de construction, du
particularisme des stèles ou de la présence ça et là d’une végétation
salvifique et sereine. Oui la vie est présente, elle est palpable, elle est
transcendante…
Ici tout est
symbole de vie, de la lampe dont s’échappe une flamme à l’urne dévoilant son
secret, de la couronne de fleurs printanières au sablier portant des ailes, de
l’étoile des libres penseurs aux mains unies des époux…
L’art
transpire la vie comme une invitation à la paix : celle des défunts et
celle des vivants…
La douleur de
la séparation s’efface peu à peu devant la beauté du message, l’invitation au
rêve, la force de l’espérance…
Les
cimetières du XIXème siècle
Bien loin
d’une vision exclusivement chrétienne de la mort, les cimetières du XIXème
siècle, sont, au contraire, le reflet d’un nouveau courant de pensée, d’une
nouvelle conceptualisation de la mort concrétisés par la signature du décret
impérial du 12 juin 1804 (23 prairial an XII) concernant la réglementation des
funérailles et l’agencement des cimetières.
A partir de cette date, l’Eglise ne
possède plus le monopole des fournitures et des services funéraires qui sont
passés aux fabriques et aux consistoires, c’est à dire des établissements
publics du Culte. Le cimetière est éloigné de la ville, dans un endroit calme
et pittoresque. Il est agencé comme un parc ou un jardin public, s’ouvrant à la
mémoire aussi bien qu’à la promenade. Il est devenu propice à la flânerie des
cœurs et des corps dans une contemplation nouvelle et jusque là impossible.
Cette nouvelle conception
philosophique de la vie et de la mort s’inscrit dans l’histoire même de notre
pays soumis aux aléas des époques et à l’évolution de la vie, mais aussi dans
la grande histoire du monde, tel le marqueur indélébile du reflet de la pensée
humaine.
Depuis la préhistoire, et dans
toutes les civilisations, la croyance en la survie de l’âme autant que le
respect des défunts furent à l’origine des différents rites funéraires. Cette
croyance s’étendait du domaine religieux à tous les courants de pensée
philosophique et humaine. Elle était naturelle, mieux, elle était innée.
L’idée du néant après la mort est un
concept récent lié aux progrès innovants de la science et à la volonté de
vouloir expliquer l’inexplicable. Or nous le savons bien, tout ce qui touche la
profondeur des âmes et des cœurs, sondant les domaines du subconscient, reste
et restera toujours un mystère aux yeux des plus éminents spécialistes.
L’étymologie du mot cimetière
(cimiterium en latin) provient du grec κοιμητηριον, voulant dire dortoir. Dans
les premières nécropoles ouvertes puis dans les catacombes, les tombes
ressemblaient à d’immenses dortoirs. Les défunts semblaient y dormir, attendant
dans la paix leur arrivée de l’autre côté de la vie. L’avènement du
Christianisme avait fait naître la volonté d’être inhumés entre frères chrétiens
le long de la Via Appia, près des corps des saints comme ceux des apôtres
Pierre et Paul. Etrusques, juifs et romains avaient l’habitude d’ensevelir
leurs défunts dans les souterrains, carrières désaffectées pour la plupart. Avec
le Christianisme naquirent les cimetières à hypogée[1],
plus complexes et plus vastes afin d’accueillir toute la communauté dans la
même nécropole. Cette organisation perdura jusqu’au Moyen Age en Europe lorsque
Charlemagne demanda une révision des codes et des rites cimétériaux. L’espace funéraire
fut alors réagencé suivant de nouvelles dispositions et selon de nouveaux rites
donnant naissance au cimetière chrétien proprement dit entourant l’église
paroissiale.
Mais les sépultures étaient
impersonnelles voire anonymes et le droit d’être inhumé à l’intérieur des
églises restait l’apanage des nobles,
contre de fortes sommes d’argent.
C’est au XVIIème siècle que les
progrès de la science et la préoccupation hygiéniste de l’époque bouleversèrent
ce schéma. Les médecins avaient établi la corrélation entre les émanations des
cimetières et les maladies contagieuses comme la peste. Le caractère insalubre
des cimetières fut proclamé et un arrêt du 12 mars 1763, du parlement de Paris,
proposa la refonte générale du régime millénaire des sépultures ad sanctos (près des saints) et apud ecclesiam (près des églises).
Les cimetières du Père Lachaise à
Paris, de la Chartreuse à Bordeaux ou de La Paillette à Libourne sont le fruit
de cette décision, plus liée à la peur de la mort qu’à une volonté réelle de
protéger les populations d’une éventuelle maladie. La préoccupation hygiéniste servit
de prétexte à éloigner la mort du centre des villes. Elle devenait gênante,
oppressante, obscène pouvait-on lire parfois.
De la lumière de la science était
née l’ombre de la mort…
La
naissance du cimetière de La Paillette
A Libourne,
la décision de construire un nouveau cimetière fut abordée et votée le 1er
août 1804 par le Conseil Municipal réunit à ce seul sujet. Mais la difficulté
de trouver un espace ralentit la procédure. C’est en 1808 que le maire de
Libourne acheta un terrain au sieur Bontemps sur la voie de pèlerinage menant
au sanctuaire de Condat. Son nom proviendrait de la métairie de La Paillette
auquel il appartenait, propriété du Chevalier de Calvimont. Il pourrait aussi
provenir d’un écrivain libournais, le sieur de La Paillette, dont les archives
du vieux cimetière de Toussaints à Nantes, révèlent la présence. Dès 1809, les
premières stèles jaillirent de terre sous la forme de mausolées dont la taille
n’avait d’égal que la notoriété de ses propriétaires. En effet, la grande
révolution des cimetières du XIXème siècle fut celle du sens napoléonien
apporté à la réglementation de la mort. Finis l’anonymat, l’injustice sociale
ou l’oubli des défunts, désormais les cimetières deviendraient des sortes de Panthéons
des Illustres offrant à tous l’identité et les mérites de ses hôtes, gravés à
même la pierre, dans un cadre idyllique où la végétation et l’architecture se
joindraient en un tableau romantique. Le Romantisme naissait… Apparu en Europe
du Nord, ce nouveau courant de pensée, faisant suite au rationalisme poussé du
XVIIIème siècle, le siècle des Lumières, s’étirait à tous les domaines, de la
peinture à la sculpture, la musique ou la politique. Il reflétait l’exaltation
du sentiment face aux limites subjectives de la raison, explorant les thèmes de
l’évasion et du rêve, du ravissement ou de la passion, s’élevant dans un fracas de couleurs, de
formes et de sons nouveaux vers le monde invisible des esprits et des âmes.
C’était le temps des Rêveries du promeneur solitaire de
Jean-Jacques Rousseau, des Méditations de
Lamartine, des Odes de Victor Hugo… le
lieu des retrouvailles spirituelles entre le ciel et la terre.
Au cimetière
de La Paillette, l’ « Allée des grands hommes », nouvellement
baptisée par la municipalité libournaise[2],
illustre la volonté de l’époque de créer un panthéon municipal accessible à
tous. Le mausolée de la famille Lacaze dans lequel repose, entre autres, le
peintre Théophile Lacaze, exprime à lui seul cette perspective de sortir de l’anonymat
et d’offrir à la vue de tous les mérites et les honneurs des célèbres
défunts. Si les mausolées furent les formes
primitives des tombeaux de La Paillette, ils laissèrent bientôt la place aux
chapelles funéraires, sortes de réduction symbolique de l’habitat des vivants
dans la ville des morts. Le cimetière en comporte vingt-deux. Il serait difficile de vous cacher que ma
préférence va vers la jolie chapelle miniature de Condat…
A la « Croisée des chemins » trône l’impressionnante colonne surmontée du buste de François Battanchon, violoniste à l’origine d’une société musicale créée en 1843. Cette œuvre architecturale grandiose met à l’honneur les mérites du musicien (et de sa famille musicienne) à travers des bas-reliefs en forme de harpe et de guitare. Son visage grave et déterminé laisse transparaître la force et aussi la fierté du personnage dont l’écharpe s’échappant dans le vent semble onduler au rythme de son cœur. Une fois de plus la vie émane de l’œuvre, tant par l’utilisation de la pierre de taille, souple et crayeuse que dans sa réalisation artistique.
Il est
important de noter, à cet instant de l’exposé, que les nouvelles législations
concernant les cimetières du XIXème siècle, prévoyaient un élargissement de
l’acquisition de sépultures individuelles, de concessions temporaires ou
perpétuelles à toutes les personnes désirant y être inhumées, toutes
confessions confondues. Le passage de la réglementation des funérailles et de
l’agencement des cimetières à la municipalité ouvrait au plus grand nombre
l’espoir d’y reposer après sa mort. De fait, la pression démographique
multiplia les tombes des anonymes qui entourèrent peu à peu celles des notables
ou des personnalités de La Paillette.
Quelques tombes remarquables et leur symbolique
L’une des plus belles œuvres, en marbre brut, est celle attribuée au jeune Léon Morin, architecte de profession ou peut-être membre d’une loge maçonnique selon les attributs qui le caractérisent (dont l’étoile à cinq branches symbole de la franc-maçonnerie ou de la libre pensée). Ce bas-relief extraordinaire offre à la sépulture un caractère hors du commun qui dépasse largement le cadre d’un tombeau. On rentre ici de plein fouet dans le monde de l’art, saisi par la force et la beauté de la sculpture.
Près de l’ « Allée des chapelles » se dresse une autre statue à la beauté saisissante représentant une jeune femme tenant dans sa main droite son visage et dans sa main gauche un bouquet de fleurs serré contre son cœur. La sensualité de ses traits contraste avec la dureté de son nom : la douleur. Ici le Romantisme prend toute sa signification à travers le mythe freudien sous-jacent d’Eros et Thanathos. L’amour et la beauté de la jeunesse, transcendés par la sensualité et l’indécence de la mort s’affrontent dans un combat intérieur ou l’amour doit vaincre pour ne pas être emporté par les pulsions morbides présentes chez tous les êtres humains. Une fois encore, sans rentrer pleinement dans une symbolique religieuse, l’œuvre magnifie la puissance de l’amour, qu’il soit humain ou christique, comme l’arme ultime de la victoire sur le mal.
A l’entrée du « Chemin des
hauts rêves » s'érige un petit monument funéraire à l’importance
cruciale. Sa forme nous indique directement la personne qui y est inhumée. En
effet la colonne tronquée ou brisée comme celle que nous voyons ici symbolise
la virilité fauchée dans la fleur de l’âge. Il s’agit donc d’un jeune homme
dont un deuxième élément renforce la description : le bas relief en bronze
montrant un avion s’écrasant au sol…
Quelques enjambées plus loin sur le « Chemin
des soldats », se dresse un autre bronze, dédicacé cette fois-ci par les
élèves d’une école chrétienne en l’honneur du père Lucaris, Charles Gaspalon
dans le civil. Le prélat était tant aimé
de ses pairs que son épitaphe ajoute les lettres majuscules TCF à son
nom : Très Cher Frère Lucaris. Son effigie en bronze est une véritable
œuvre d’art que de nombreux pillards ont tenté de dérober. Des traces de coups
de burin sont visibles au bas de la sculpture sur la droite.
Il est malheureusement impossible de
faire le compte des œuvres pillées dans le cimetière, le conservateur en
découvre de nouvelles régulièrement. A croire que les voleurs connaissent mieux
que nous la valeur patrimoniale du lieu. Voilà pourquoi la municipalité a
choisi de mettre en valeur le cimetière de La Paillette, le réhabiliter, le
conserver, le promouvoir par un guide de visite et porter un souci grandissant
à son agencement et à son utilisation. Cet intérêt municipal, suscité par Annie
Conte, Déléguée aux droits civiques, aux archives et aux affaires juridiques,
est une belle récompense pour tous les amoureux du patrimoine libournais et un
honneur pour l’OPPAL de voir Libourne retrouver sa place dans le cœur de ses
élus et de ses habitants…
Le cœur, peut-être est-il là le
maître mot du cimetière de La Paillette, le cœur, symbole de vie, symbole
d’amour. Cœur des hommes, cœur des âmes, ses battements sont éternels comme est
l’amour qui ne s’éteint jamais entre les êtres qui s’aiment. La séparation
physique et douloureuse de la mort ne marque en rien la fin de l’amour, au
contraire elle le transforme, elle l’affine, le transcende. L’amour est
désormais libre et sans limites. Le symbole des mains jointes que l’on retrouve
un peu partout dans le cimetière le confirme : l’amour est éternel.
Au bout du « Chemin des hauts
rêves », on peut sentir battre le cœur du cimetière de la Paillette :
une stèle particulière à la symbolique éminemment christique, révèle la
représentation d’un cœur humain placé aux creux d’un écrin de pierres sur
lequel se dresse une croix enveloppée de lierre. Il s’agit du Sacré Cœur de Jésus,
qui, contemplé par les visiteurs, devient objet d’adoration, Saint Sacrement
par excellence. L’amas de pierre qui le contient symbolise le calvaire, le
Golgotha, lieu de la mort du Christ.
Mais la mort sans la résurrection n’existe pas, tel est le message de l’Evangile, aussi le calvaire est-il directement surmonté d’une croix symbolisant le redressement de l’homme dans la vie éternelle. Et pour ceux qui n’y croiraient toujours pas, un nouvel élément vient magnifier l’ensemble, prenant sa source à la base de l’édifice et s’élevant jusqu’au ciel : le lierre, symbole d’éternité et d’attachement. Non la mort sans résurrection n’existe pas, le lierre révèle le cœur de Jésus, symbole du cœur des hommes, et sert de lien entre l’Ancien et le Nouveau Testament.
Mais la mort sans la résurrection n’existe pas, tel est le message de l’Evangile, aussi le calvaire est-il directement surmonté d’une croix symbolisant le redressement de l’homme dans la vie éternelle. Et pour ceux qui n’y croiraient toujours pas, un nouvel élément vient magnifier l’ensemble, prenant sa source à la base de l’édifice et s’élevant jusqu’au ciel : le lierre, symbole d’éternité et d’attachement. Non la mort sans résurrection n’existe pas, le lierre révèle le cœur de Jésus, symbole du cœur des hommes, et sert de lien entre l’Ancien et le Nouveau Testament.
Le Christ a vaincu, l’amour est plus
fort que la mort…
Partout le même message sculpté de
manière différente : la belle dormeuse de l’allée éponyme ne semble pas
éteinte à la vie, elle rêve doucement. Une couronne végétale de feuilles
d’Acanthe l’invite à l’éternité et le bouton reconnaissable d’une rose fanée
renseigne le visiteur sur sa mort, paisible, dans la fleur de l’âge…
Sur le « Chemin des soldats »,
près de la sortie, juste avant le somptueux monument aux morts, surgit un
sablier ailé, symbole du temps de Dieu qui n’est pas le nôtre. Dieu est celui
qui est. Son présent est partout, en toute chose, en tout homme. Il n’a ni
début ni fin, il est incorruptible. Son présent est éternel comme le deviennent
les âmes qu’Il accueille en son sein…
Même le monument aux morts semble
vouloir rejoindre le ciel par la flamme jaillissant d’une urne trônant à son
sommet. Ici pas de symbolique religieuse par respect des croyances de
l’ensemble des soldats tombés pour la France durant la terrible guerre de
14/18. Tous les noms gravés au pied de la stèle appartiennent aux hommes qui y
sont enterrés. Ils y sont tous, sans exception. Le monument vibre autant de
l’hommage qu’il leur rend que de la beauté de son art. Une fois encore la pierre
chaude et savamment sculptée semble s’animer sous le regard. Elle représente
les attributs des soldats des différentes guerres depuis 1870. Sa beauté
transporte l’âme et élève le cœur qui, désormais ouvert, peut comprendre le
message de l’urne : principe de vie féminin, lieu de la fécondation,
duquel jaillit la flamme de la connaissance, de la transmission… la naissance
de l’homme, au delà de toutes les guerres, au-delà de la mort…
Qu’il est difficile pour moi d’arrêter là ce voyage. J’aurais tant de choses à vous dire… tant de symboles à vous montrer… tant de récits à vous livrer… mais peut-être est-il là le mystère de La Paillette : celui de se dévoiler lentement au rythme du temps qui s’écoule, d’un temps qui n’est pas le nôtre…
Un dernier hommage
Pourtant,
en remerciement à la Municipalité d’avoir apporté un éclairage heureux à ce
haut lieu du patrimoine libournais, j’aimerais rendre un dernier hommage à un
homme dont l’oubli n’a d’égal que la grandeur de ses œuvres : Henri-Jean
Moreau. Cet artiste peu connu, voire négligé en son temps est peut-être le plus
illustre lien qui unit la ville de Libourne au cimetière de La Paillette. Car
Henri-Jean Moreau n’est autre que l’auteur du buste de René Princeteau trônant
sur la place du même nom à l’entrée de la Poste, de l’avion du jeune Champly
mort en 1917 et bien d’autres encore.
Mais surtout c’est celui qui a
offert à Libourne l’un de ses plus beaux monuments, une œuvre grandiose sur
laquelle se recueillent régulièrement les élus de la Ville et les anciens
combattants : L’Ange du Blessé.
Emouvant hommage aux morts
libournais, message d’espérance, d’amour et de pardon, le monument illumine la
place du Poilu sans mémoire aucune pour Henri-Jean Moreau. Exilé au Maroc, face
au manque de considération de son pays, l’artiste réalisa des sculptures importantes
comme celle du Lion de Rabat ou du buste de Mohammed V. Il revint en Gironde en
1954, malade, avant de s’éteindre en 1956 dans l’indifférence générale. Deux
photos de sa sépulture, prises à un an d’intervalle, montrent les dégradations
causées par le temps et le manque d’entretien. Il n’a plus d’héritiers…
Mais nous, habitants de Libourne, ne sommes-nous pas tous ses héritiers ? Ne lui devons-nous pas beaucoup ? Puisse son œuvre être réhabilitée dans les cœurs et la mémoire des libournais et son tombeau sauvé de l’oubli…
Enfin, passant sous le porche de
l’entrée principale du cimetière et jetant un dernier regard sur l’univers
insoupçonné que je venais de découvrir, je pouvais lire deux lettres, timides,
discrètes, déposées simplement sur les deux énormes piles latérales :
l’alpha et l’oméga de l’alphabet grec. Et j’entendais résonner en moi dans un
ultime hommage à ce lieu unique, point de jonction entre le ciel et la terre,
la phrase de l’Apocalypse de Saint Jean : « …Je suis l’Alpha et l’Oméga, le
Principe et la Fin, celui qui a soif, Moi, je lui donnerai de la source de vie
gratuitement ».
Camille Desveaux
(Clichés C. Desveaux)
[1] Cimetières extérieurs à l’inverse
des catacombes
[2] Pour les Journées du
Patrimoine 2015, Madame Annie Conte Déléguée aux droits civiques, aux archives
et aux affaires juridiques, a inauguré le Guide de visite du cimetière de La
Paillette, consacré à l’histoire, la symbolique, l’architecture et les
personnalités inhumées, élaboré sous sa conduite par les services et les
intervenants concernés, et entièrement gratuit. N’hésitez pas à le demander.