Les Pierres Précieuses de Libourne |
Le 29 septembre prochain, vous le savez peut-être, la bastide fêtera ses 750 ans.
Cette célébration sera l’occasion pour tous, de nous retrouver autour de Roger de Leyburn, illustre parrain de notre bastide, en compagnie de Bob Ulph, maire de Leybourne, près de Londres, et des propriétaires du château natal du chevalier anglais.
Cette fête sera aussi pour moi, la consécration de 30 années de recherches et de travaux sur l’histoire de la jolie bastide du confluent, l’aboutissement d’un long parcours de mise en lumière historique et patrimoniale que je garderai à jamais dans mon cœur.
Cette célébration sera l’occasion pour tous, de nous retrouver autour de Roger de Leyburn, illustre parrain de notre bastide, en compagnie de Bob Ulph, maire de Leybourne, près de Londres, et des propriétaires du château natal du chevalier anglais.
Cette fête sera aussi pour moi, la consécration de 30 années de recherches et de travaux sur l’histoire de la jolie bastide du confluent, l’aboutissement d’un long parcours de mise en lumière historique et patrimoniale que je garderai à jamais dans mon cœur.
Je vous propose de revenir chaque
semaine sur ces pierres précieuses qui ont fait ou font encore la beauté de
Libourne, dans une série exceptionnelle, reprenant de manière originale les
grands lieux de la bastide, leur origine et les personnages qui ont gravité
autour d’eux. Je vous invite à un grand voyage dans le temps, un retour aux
sources, qui nous réconciliera avec nos origines pour mieux nous ancrer dans la
beauté de notre présent, loin des vicissitudes et des incertitudes temporelles…
Alors sans plus attendre, partons à
la découverte de Libourne, qui à l’origine, s’appelait Kendatten en celte,
Condatis en latin, ce qui veut dire : confluent !
Episode
1 :
Condat, Terre Sacrée
Alors suivez-moi, je
vous emmène à la rencontre de ce lieu exceptionnel, monument emblématique et
sacré qui reste et restera toujours pour moi l’âme de Libourne, là où tout a
commencé…
***
Pendant plus de mille
ans, Libourne s’est appelé Condat. Ce nom lui fut donné par les Celtes
Bituriges lors de leur implantation en Aquitaine vers le IIème siècle avant
Jésus-Christ. Contrairement à leur nom, les « rois du monde » ne
s’illustrèrent pas par la force en s’installant dans la région mais
développèrent au contraire une étonnante diplomatie et un grand sens du
commerce. Strabon parlait d’eux comme d’un peuple à part, détaché du reste du
continent, possédant une langue et des pratiques guerrières propres et un
système social basé sur l’amitié. Pline l’ancien les nommait « les
Bituriges libres surnommés Vivisques ». En quittant leur territoire d’origine, la région de Bourges, Les
Bituriges Vivisques s’étaient détachés des Bituriges Cubes et avaient adopté la
nouvelle dénomination de vivisci. Ils étaient les déplacés, les transplantés,
les vivants. Mais avant tout ils étaient libres. Toute leur vie semblait un témoignage
de cette liberté, depuis leur génie commercial jusqu’à la vénération qu’il
portait à la Déesse Divona, la grande déesse des eaux. Mais peut-être
était-elle là la clef de leur succès, de leur « génie pacifique et
marchand » : un culte de l’eau hors du commun qui leur fit préférer
l’estuaire et ses deux fleuves nourriciers à toute autre région adoptive.
Depuis l’embouchure de la Gironde
jusqu’au Langonnais sur la Garonne et au
Libournais sur la Dordogne, l’Aquitaine prenait corps et avec elle son
identité : le Pays des Eaux. Grâce aux Bituriges Vivisques, génies
visionnaires ou commerçants talentueux, elle allait devenir la porte de
l’océan, une terre d’avenir aux racines fluviales largement ancrées dans un sol
fertile et prometteur.
Sur le long
ruban sacré des rivières, naquirent des oppida (agglomérations fortifiées,
oppidum au singulier) que les Bituriges Vivisques associaient toujours à un
marché et à un sanctuaire.
Le tertre de Fronsac surplombant le confluent |
Situé au confluent de l’Isle et de la Dordogne, le petit port de Condatis (du celte Kendatten voulant dire confluent), qu’ils venaient de créer, offrait la particularité de s’ouvrir sur les terres intérieures grâce à ses rivières et d’être protégé des arrivées maritimes par un immense tertre alluvionnaire naturel de soixante dix mètres de haut, le tertre de Fronsac. Ce tertre servit plus tard de socle au château de Charlemagne et acquit la réputation de « clef de défense de tout le nord du pays bordelais ».
De la même manière que
Burdigala s’était parée du nom de son emplacement (crique boueuse), Condatis
avait pris celui de son confluent, à la rencontre de l’Isle et de la Dordogne.
Nom doublement sacré pour les celtes bituriges qui honoraient à la fois Divona,
leur déesse des eaux et Condat, autre nom donné au dieu Mars, mi guerrier, mi
magicien.
La source miraculeuse de Condat (aujourd'hui privée) |
Or, dans ce
lieu cintré par les eaux, cette zone inondable que l’on nomme palus, sourdait
une eau pure au cœur d’une végétation dense et boisée. Source divine par
excellence, elle possédait déjà pour les Celtes, des vertus curatives
particulières et servait de lieu de rassemblement et de célébrations druidiques.
La présence
de la monumentale main levée de Pierrefite, ce bloc monolithe de cinq mètres de
haut, située en bord de Dordogne à trois kilomètres en amont de la source,
appuie cette hypothèse : seuls les druides possédaient la connaissance
spirituelle, scientifique et astronomique pour déplacer des mégalithes de la
taille de celui de Pierrefite, extrait des affleurements calcaires de
Saint-Emilion. Les récentes recherches historiques et archéologiques sur les
Celtes ont démontré que les pierres levées servaient à marquer l’emplacement de
tombe, d’un lieu remarquable ou à délimiter un territoire.
A Pierrefite, l’immense main tournée vers Saint-Emilion semble surtout indiquer un chemin spirituel où la terre libournaise et le ciel ne font plus qu’un.
A Pierrefite, l’immense main tournée vers Saint-Emilion semble surtout indiquer un chemin spirituel où la terre libournaise et le ciel ne font plus qu’un.
Le tumulus
découvert près de la source de Condat s’érige comme une nouvelle preuve de la
sacralité de ce lieu hors du commun. Pendant longtemps, on a cru que c’était un
grand tombeau, soit d’origine celtique, soit d’origine médiévale mais les
fouilles effectuées en 1940 par des archéologues libournais infirmèrent cette
hypothèse : ici point d’ossements, dépouilles mortuaires ou autre
sépulture funéraire, seuls quelques débris de poteries insignifiants.
Insignifiants, pas tout à fait, car selon le professeur Michel Bourrières,
spécialiste de la question, « qu’ils fussent ou non des tombeaux, les
tumulus sont cependant considérés comme ayant été des lieux consacrés. »
Lorsqu’ils
possédaient une grande dimension, ces tertres servaient de lieu de réunion pour
les druides. Ainsi le tumulus de Condat n’était-il pas un tombeau mais
peut-être un lieu d’assemblée des sages près de la source sacrée.
Il n’est point besoin d’être un grand
connaisseur de ces choses pour ressentir la charge des forces telluriques concentrées
au dessus du menhir de Pierrefite et de la source de Condat. Même pour de
simples visiteurs la sensation physique et émotionnelle est unique. On se sent
transporté, soulevé de terre, happé par une puissance qui nous suspend entre
ciel et terre comme des funambules de l’invisible.
Un siècle
avant la naissance du Christ, le chef des druides regroupés dans la forêt des
Carnutes, annonça comme une prophétie, la future délivrance de la Virgini Pariturae…
La déesse préférée des Bituriges
vivisques, Divona, celle qu’ils considéraient comme la Déesse Mère, était
matérialisée par l’eau des sources dont certaines, comme celle de Condat, lui
étaient consacrées. L’une des plus somptueuses fontaines dédiée à Divona que
l’Aquitaine n’ait jamais connue se situait à Burdigala, la grande cité
marchande des Bituriges, le Bordeaux d’aujourd’hui. C’était un véritable temple
dont la hauteur rivalisait avec la beauté architecturale. Lieu divin par
excellence, les gens y venaient chaque jour par centaines, en procession ou
individuellement, pour demander des grâce à la déesse. D’ailleurs, ce monument
exceptionnel, décrit dans les chroniques comme le plus beau de la ville,
portait le nom de Fontaine Divona.
« Au milieu de la ville s’étend le lit d’un fleuve né d’une fontaine… quelle profondeur et quelle abondance ! Comme elle enfle ses eaux ! Quels larges et rapides torrents elle roule ! Elle ne s’épuise jamais pour les innombrables besoins du peuple… Salut, donc, fontaine à la source mystérieuse, sainte, bienfaisante, intarissable, cristalline, azurée, profonde, murmurante, limpide, ombragée. Salut, Génie de la Ville, toi qui nous verses un breuvage salutaire, toi, Divona, qui dans la langue des Gaulois signifie source mise au rang des Dieux ».
Une autre
ville magnifiait la déesse Divona au point d’en prendre son nom : Divona
Cadurca : Cahors. Les Cadurques, peuple celte voisin des Bituriges
Vivisques établis sur le territoire de la haute Dordogne et du Lot, vouaient la
même fascination à l’eau et à ses divinités tutélaires. Divona en était la
reine.
La magnifique
fontaine Divona de Bordeaux a aujourd’hui disparu, laissant la place à la ville
moderne, mais de nombreux historiens s’accordent à la placer sur la Place Pey
Berland où une inscription y figure désormais.
Camille
Camille
La semaine prochaine, la suite de notre série consacrée aux Pierres Précieuses de Libourne :
Episode 2, Le château de Condat
Vous pouvez retrouver cette belle histoire dans mon ouvrage :
Il était une fois la Chapelle de Condat, âme de Libourne
Il était une fois la Chapelle de Condat, âme de Libourne
En vente chez:
- Librairie Madison
www.librairie-madison.fr
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- Librairie Acacia Formatlivre
- La Tabatière
- L’Office de Tourisme du Libournais
http://www.tourisme-libournais.com/
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